Sunday, January 12, 2014

Où en est-on 4 ans après le séisme du 12 janvier 2010 en Haiti?

Où en est-on 4 ans après le séisme du 12 janvier 2010 en Haiti?

Par Carl Gilbert et Régine Magloire Sainvilus, étudiante en journalisme

Mots clés: Reconstruction, failles, prévention, développement, urbanisme, budget, déplacés, primature haitienne, assistance.

Aujourd’hui fait exactement quatre (4) ans depuis que le séisme du 12 janvier a opéré des dégâts en Haïti.

Le séisme de 2010 en Haïti a été un tremblement de terre phénoménal. Sa magnitude s’est située entre 7,0 à 7,3 compris. Il est survenu le 12 janvier 2010 à 16 heures 53 minutes, heure locale. D épicentre situé environ à 25 km de Port-au-Prince, la capitale d’Haïti, il a donné lieu à environ douze (12) secousses secondaires de magnitude 5,0 à 5,9 dans les heures suivantes. Un deuxième (2e) séisme dont la magnitude a été proche de 6,1 s’est réalisé le 20 janvier 2010 à 6 heures 3 minutes, heure locale. Par son foyer à 59 km à l’ouest de Port- au-Prince, il est survenu à moins de 10 kilomètres sous la surface.

De nombreuses victimes, morts, blessés et amputés, paralysés en sont résultés. A la date du 9 février 2010, 300 000 morts, 300 000 blessés et 1,2 million environ de sans-abris formeraient le bilan du jour. 95% à 99% des personnes mortes ont été tuées par des maisons en béton armé, des murs élevés situés dans la rue. La majorité des maisons qui sont tombées sont celles qui avaient été mal construites : soit pas suffisamment de poteaux, de fer, soit trop de poteaux et de fer! Les vibrations des engins lourds, camions ont provoqué l’éboulement d’édifices mal construits également et qui se sont effondrés par la suite L’enregistrement de 52 répliques d'une magnitude supérieure ou égale à 4,5 aurait été révélé par l’Institut géologique américain le 24 janvier. L’extraction de 211 rescapés des décombres a été effectuée par les équipes de secouristes sorties du monde entier. Les efforts des Haïtiens ont donc été renforcés par cette solidarité internationale. Les Haïtiens avaient dû eux-mêmes opérer des sauvetages de centaines de personnes, à mains nues la plupart du temps.

La catastrophe a affecté les structures et l’organisation de l’Etat haïtien : d’où une déclaration de l’état d’urgence après 3 jours sur l’ensemble du pays pour une période d’un mois. Le palais national et la cathédrale Notre-Dame de Port-au-Prince ont connu la destruction totale parmi d’autres bâtiments.

Les rénovations se font à pas de tortue.

Prévenir vaut mieux que guérir, dit l’adage. Il devrait être interdit de construire des édifices trop proches les uns des autres voire au dessus des autres. Ces contructions devraient toutes être publiées dans des bulletins locaux. Elles devraient toutes être connues de tous pour éviter des constructions les unes sur les autresautre ou trop proches les unes des autres. Les normes de construction parasismiques ne sont pas respectées. C’est seulement cette semaine qu’a eu lieu la première conférence discutant les constructions parasismique en Haiti. Jusqu'à présent, la majorité des haïtiens, quand ils veulent construire, ne font appel qu’à des « bosses en maçonnerie » au lieu de demander l’assistance d’ingénieurs bien informés sur les séismes.

Au point de vue urbanisme, il ne devrait pas être question que les maisons soient construites par des individus mais par des compagnies. Il suffit de regarder les mornes entourant la capitale pour constater que rien n’a changé concrètement dans le domaine de la construction des maisons.

Quid des déplacés ? Selon un récent rapport des Nations unies publiées le 30 septembre 2013, 171 974 personnes demeurent encore sur 306 sites temporaires, et les objectifs en matière de reconstruction ont été atteints dans une proportion de 13 %.

Le chercheur Paul Cliche, de l’Université de Montréal, a indiqué qu’ «On a fait des constructions d’abris temporaires. Il y en a 113 595 selon les données officielles. Comme on dit souvent en Haïti et dans certains pays du Sud, il n’y a rien de plus permanent que ce qui est temporaire», a-t-il ajouté au cours d’une entrevue téléphonique.

«Ce dont je me doute, c’est que les abris temporaires vont devenir des maisons permanentes. C’est quoi ça, en termes de dignité humaine?»

Dans la foulée du séisme, par dizaines de milliers, les sans-abri ont érigé des camps de fortune dans les villes dévastées par la catastrophe. A propos des failles, une instance étatique devrait les surveiller, vérifier si elles sont actives, vu qu’il semble que beaucoup de failles de dimensions variées traverseraient le pays. Un budget devrait être créé à cette fin. Des sismologues ont été formés, ainsi que des géologues. Un budget fixe pour que des lectures des failles puissent être effectuées par le ministère de l’environnement a été par la suite planifié ainsi que des machines afin de prévenir les séismes et d’y remédier le plus possible. Des mesures préventives portant sur le sauvetage sont radiodiffusées de temps à autre. Malheureusement ces séances de sauvetage divulguées ne conviennent pas au pays, la plupart des gens, étant toujours effrayés à la pensée des secousses, les imaginant parfois tandis que d’autres se croyant pragmatiques les ignorent tout bonnement.

Et l’assistance est-elle « mortelle » comme le suggère le film du cinéaste Raoul Peck ? On est tenté de le dire. Qu’il s’agit de l’aide américaine ou de l’aide canadienne, diverses publications ont montré qu’elles sont entachées de manque de transparence, de « boite noire », c’est-à-dire qu’une partie de cette assistance est tombée ou bien dans un panier « sans fond » ou bien dans un coffre dont la clé est en dehors d’Haiti.

« À plus grande échelle, la question du développement économique du pays est également préoccupante, a relevé le chercheur associé au Réseau d’études des dynamiques transnationales et de l’action collective (REDTAC) de l’Université de Montréal. Ottawa oriente son aide vers le développement du secteur minier et de zones franches, un modèle économique qui maintiendra les citoyens du pays en situation de pauvreté, a prévenu M. Cliche. «C’est un développement qui est extraverti, qui a le regard vers l’extérieur, vers l’exportation. Qui va acheter les métaux et les vêtements qui sont faits en Haïti? Ce ne sont pas les Haïtiens», a-t-il expliqué.

La Primature haitienne a fait son bilan de l’année dernière sur son site et s’est donné pleinement un satisfecit quant à la reconstruction quatre ans après le séisme : « Laurent Lamothe a dressé un bilan positif des différentes réalisations de son gouvernement… Sept bâtiments publics sont en construction et des études sont déjà réalisées pour au moins cinq autres. « Selon le dernier rapport de l’OIM, nous passons de 1 500 000 déplacés en 2010 à 147 000 en 2013, a déclaré Laurent Lamothe. Nous sommes très satisfait de ce résultat.»

«...Plus de 40 bâtiments publics ont été détruits lors du séisme de janvier 2010. Dans le cadre de la reconstruction du pays, le gouvernement haïtien, grâce au fonds PetroCaribe, a mis une somme de 17 millions de dollars américains par bâtiment pour reconstruire ces différents édifices. La construction de la Villa d’accueil, la construction du ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, le chantier du ministère des Affaires étrangères et des Cultes, le chantier du ministère du Commerce et de l’Industrie, le chantier de construction des baraquements du CIMO sont parmi les travaux de construction en cours qui devront terminer, selon le Premier ministre, dans la première moitié de l’année 2014. « Nous avons terminé la première phase de la construction du village Lumane Casimir qui peut recevoir plus de 3 000 logements. Grâce à un financement vénézuélien, nous allons ajouter 2 500 logements à ceux déjà construits au village.» En termes d’infrastructures routières, le Premier ministre a annoncé la construction de deux tronçons de route au centre-ville de Port-au-Prince dans le cadre de la construction de la cité administrative. « Un contrat est signé avec la firme espagnole Euro Estudios pour les études de construction des rues Monseigneur Guilloux et du Champ de Mars, a-t-il fait savoir. La firme a été autorisée à démarrer la deuxième phase des travaux au cours de l’été si le processus d’expropriation est complété.»

Mais à voir les diverses manifestations qui émergent dans les grandes villes du pays de manière soutenue, on est à même de se demander si les masses sont aussi satisfaites que le gouvernement. Et la question des élections est une épine au pied et du gouvernement haitien et de la communauté internationale qui mise, avec un petit élan d’optimisme, sur ces élections pour faire croire au monde en général et aux investisseurs en particulier que la démocratie est bel et bien partie et qu’Haiti « is really open for business » 4 ans après le séisme dévastateur.

Mais c’est un élan d’optimisme qui ne prend pas en considération, quatre ans après, les taux croissants de mortalité du choléra importé et de ceux infectés avec la maladie* outre le verdict 168-13 dominicain qui « dénationalise » plus 200 000 individus d’ascendance haïtienne. Un verdict qui risque toutefois d’envenimer les relations haitiano-dominicaines.
* « …Le pays n’est pas non plus sorti de l’auberge en ce qui a trait à la situation sanitaire: l’épidémie de choléra fait toujours des ravages, et l’ONU estime à 2,2 milliards $ le montant nécessaire à son éradication. À ce jour, seulement 180 millions $ ont été engagés, d’après les informations contenues dans le rapport de Paul Cliche. »

Carl Gilbert avec la collaboration et contribution de l’étudiante en journalisme Régine Magloire Sainvilus, ce 12 janvier 2014

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